15 mai 2020.
Deux mois sans faire de la moto, je crois que cela ne m'était jamais arrivé!
Hier, c'était journée de récup car le confinement n'a pas été synonyme de chômage partiel pour moi, bien au contraire.
La météo était pessimiste, mais je m'en moquais royalement. Elle aurait pu annoncer de la neige ou un ouragan, je partais quand même.
Quelle émotion pendant ces premiers tours de roues. Il fait frisquet à cette heure matinale et la route est bien mouillée mais le bonheur est bien présent sous le casque.
Je quitte les routes trop fréquentées pour une qui serpente entre les bois et les champs. Qui monte et descend. Ma moto semble aussi heureuse que moi, elle se balance à droite, à gauche avec gourmandise. Je laisse le bicylindre prendre son rythme. J'ouvre régulièrement la visière, j'ai besoin de respirer, sentir les effluves de la campagne.
Plus tard, j'emprunte cette route très étroite qui grimpe. Elle est gorgée d'eau, de véritables ruisseaux se sont formés. J'aime ces conditions un peu extrêmes, j'ai le sentiment de revivre.
J'arrive sur le piémont. Le petit cours d'eau s'est fait torrent. Il dévale la pente, en bord de route. Je reste attentif, la route est piégeuse par endroits.
Des trouées s'invitent dans la brume , dévoilant un ciel clair et lumineux, puis je replonge dans le brouillard.
Le col d'Aspin semble m'inviter à venir le voir. J'augmente les pulsations de mon moteur en ouvrant un peu plus la poignée de gaz. Le froid s'invite et je mets les poignées chauffantes en marche. J'aborde les premières épingles avec prudence puis hausse le rythme avec une confiance qui s'accroît au fur et à mesure de la montée. Les pneus sont suffisamment chauds maintenant, moi aussi!
J'arrive au sommet enveloppé par un brouillard glacial. Une petite photo et j'entame les douze kilomètres de descente dans la zone basse du compte tours. La moto se balance d'un virage à l'autre avec cette facilité que j'apprécie tant. Je ne croise qu'un véhicule, un cycliste retrouvant lui aussi le plaisir de la route de montagne.
Traversée d'Arreau. Je note que les commerces sont ouverts. La vie reprend.
J'attaque le col de Peyresourde. L'horizon s'éclaircit. Les portions sèches sont de plus en plus nombreuses et j'augmente les prises d'angle. Au sommet, c'est de nouveau le brouillard qui s'invite mais je bascule sur un versant plus épargné. Le soleil fait son apparition, je laisse le moteur vrombir. D'une petite impulsion sur le guidon, j'engage la moto dans les nombreux virages au revêtement lisse. Je souris sous mon casque. J'arrive à Bagnères de Luchon. J'avais tracé un cercle de 100 kilomètres sur ma carte Michelin et je suis arrivé au maximum qui m'est permis.
Demi-tour. Après quelques kilomètres, je prends la direction du lac d'Oô. Il fait beau maintenant. Petit halte pour grignoter un peu.
L'envie de rouler est la plus forte.
La route a séché et je pilote de plus en plus relâché. Dans la descente du col de Peyresourde, je bifurque sur la gauche, direction Loudenvielle puis le col d'Azet. De temps en temps, la traversée d'un typique village de montagne me permet de ralentir et profiter de l'atmosphère qui s'en dégage. Pendant que le moteur ronronne à bas régime, je m'en imprègne, visière ouverte.
C'est le col d'Azet qui m'accueille maintenant. Aujourd'hui, ce sera la partie "sportive" de ma balade. Le compte-tours grimpe un peu plus haut, les flancs des pneus sont plus sollicités. Je me régale de cette boîte de vitesses si douce et précise qui accepte les nombreuses sollicitations. Cela commence à ressembler à un grand moment de bonheur!
Après la montée .... il y a la descente. Celle-ci se fait plus calmement et je profite du panorama.
Voilà Saint Lary, très calme.
Un peu plus tard, j'entame la montée de la Hourquette d'Ancizan malheureusement interrompue au bout de quelques kilomètres. La route est fermée.
J'en suis quitte pour un nouveau passage au col d'Aspin. La route s'est asséchée depuis tout à l'heure et c'est une bonne excuse pour avoir moins de retenue dans ma conduite. Quelle jouissance dans cette montée de douze kilomètres! De nouveau le brouillard au sommet, encore plus dense que ce matin. Je descends donc très calmement avec une belle frayeur en croisant un gros 4X4 Toyota noir à pleine vitesse sans phares!
Plus que quarante kilomètres jusqu'à Tarbes jusqu'où je me laisse glisser, heureux de ma journée après ces deux mois de manque.
Après un bon repas en famille, encore quarante petits kilomètres de nuit très humides mais où le plaisir était au rendez-vous malgré tout.
Pour parfaire le tout, l'ordinateur de bord m'indique une moyenne de 2,9 litres aux 100 après ces 350 petits kilomètres au goût si particulier.
Je rentre la moto au garage mais je sais que l'envie de repartir va très vite revenir. Il va en falloir, des kilomètres, pour combler ces deux mois sans moto!