2015 fut une année médiocre pour la Honda NCX 750 en France (507 immatriculations) . C’est pour cela que j’accueillis avec plaisir l’annonce d’un modèle remanié en octobre 2015. Une base inchangée mais avec de multiples améliorations.
Ce fut l’occasion d’apprendre que cette moto est très importante pour Honda et qu’elle représente sa meilleure vente mondiale de motos de grosse cylindrée. En Europe, 33 000 motos ont déjà été vendues. En Italie, elle y est très appréciée (2590 ventes en 2014, soit en 2ième position, 2292 ventes en 2015 et déjà 676 ventes sur les trois premiers mois de l'année 2016).
J’étais partant quand Philippe m'avait proposé d’essayer la NCX 750 qui me faisait de l’œil depuis quelques semaines dans le magasin. En effet, plusieurs améliorations avaient retenu mon attention et j’avais très envie de vérifier par moi-même ce qu’elles donnaient sur le terrain.
Samedi 16 avril 2016, 14 heures. Je gare ma Transalp devant le magasin et Philippe sort la NCX 750. Nous avons deux bonnes heures pour faire connaissance. La situation géographique privilégiée de Tarbes me permet de rejoindre les sommets pyrénéens malgré ce laps de temps assez court.
Démarrage. Un son plus grave, plus profond s’échappe du pot d’échappement plus court et que je trouve plutôt esthétique.
Je sélectionne le mode S1 que je pressens convenir à mon style de conduite. C’est effectivement un des changements apportés à cette moto, la possibilité d’opter pour 3 sous-modes S1 S2 S3. Je quitte la ville en douceur, avec une boîte encore plus réactive et douce.
J’ignore la route principale et gagne les coteaux par les départementales plus sinueuses, plus bosselées et offrant de multiples variétés de virages. J’ai envie d’emmener la moto sur les terrains qu’affectionne tant ma Transalp car, derrière cet essai, je dois avouer que j’ai besoin de faire le point sur l’orientation que je vais donner à mon futur motard.
Pour l’instant, j’apprécie toujours autant l’extrême facilité avec laquelle on manie cette moto. Tout est doux, évident et la boîte fait très bien son boulot, de manière totalement imperceptible. Je n’ai fait qu’une dizaine de kilomètres mais je commence à aimer ce mode S1 qui est très proche dans son fonctionnement de ma manière de passer les rapports. Je m’en rends compte dans la montée qui se dirige vers Barbazan-Dessus. Elle rétrograde au bon moment, maintient la vitesse sélectionnée entre deux virages serrées, puis passe le rapport supérieur comme je l’aurais fait lorsque j’ouvre un peu plus les gaz dans la courte ligne droite avant le village.
Je bifurque plein sud. J’ai la plaine à ma droite, un peu plus bas et les Pyrénées, en face, encore enneigées semblent m’inviter. J’emprunte un chemin pour une séance photos. La fourche réagit bien sur les chocs, je l’avais déjà remarqué sur la partie de route fripée empruntée tout à l’heure. Elle a gagné en qualité d’amortissement.
Je ne peux m’empêcher de faire la comparaison avec ma Transalp, moi l’adepte depuis longtemps des trails aux grands débattements et à la roue avant rayonnée de 21 pouces. Là, je retrouve un train avant de routière trail avec une certaine vivacité alors que ma vieille moto joue plus sur le registre de l’absorption des chocs alliée à une légère inertie provoquée par la grande roue. C’est efficace dans les deux cas mais le ressenti est différent.
Je quitte les coteaux et arrive à Bagnères de Bigorre. La dernière ligne droite est avalée dare-dare ; ce moteur toujours aussi coupleux permet de se retrouver très vite et en toute décontraction à des vitesses inavouables.
Le tableau de bord a gagné en lisibilité et respire un peu plus la gaieté avec des couleurs différentes qui s’affichent au niveau du compte-tours.
Je rejoins la route qui mène au col d’Aspin. Je joue régulièrement à saute-mouton avec les voitures qui sont avalées d’une simple torsion de la poignée de gaz. La main gauche et le pied gauche restent au repos, j’ai juste à me concentrer sur mon pilotage, la boîte fait très bien son travail.
Cela va d’ailleurs me servir lors d’un dépassement « ajusté » à la sortie de Sainte Marie de Campan, juste avant le virage prononcé à gauche. Ce qui se serait terminé par une petite chaleur avec une boîte traditionnelle a juste nécessité un placement précis de la moto sur sa trajectoire en dosant le freinage pendant que la boîte oeuvrait en dessous en rétrogradant instantanément, suivi d'une franche accélération pour mettre la moto en tension et sortir du virage dans le beau vrombissement du moteur.
A chaque fois que je redécouvre la boîte DCT, c’est une révélation. Elle m’apporte une réelle sérénité en conduite un peu enlevée et rajoute du plaisir à mon pilotage. C’est très jouissif. En outre, je trouve que le moteur a un peu plus de caractère. Serait-ce le bruit du nouvel échappement qui donne cette impression ou bien le bicylindre a-t-il gagné un petit peu dans le domaine. Impossible à dire mais le fait est que j’ai envie de hausser le rythme au fil des kilomètres d’autant que la partie cycle est toujours aussi rassurante, avec une moto précise et stable dans les enfilades de virages.
A ce rythme, j’arrive vite à Payolle et me dirige alors vers le col de Beyrède. Fini le beau revêtement, ce sont les gravillons et les nombreuses saignées qui m’attendent. Je ralentis et me laisse tracter par le moteur longue course avec toujours une boîte qui est à mes petits soins. D’ailleurs, un fait ne trompe pas, c’est la première fois que je ne ressens pas le besoin de sélectionner le mode manuel. Le mode S1 est celui que j’attendais, et que j’avais réclamé lors de mon dernier essai.
Arrivée au col de Beyrède désert. La météo prévue pour cet après-midi n’est pas très bonne mais, pour l’instant, le soleil m’accompagne.
Je suis la suggestion de Philippe et emprunte le chemin qui rejoint le col d’Aspin. La position debout s’impose ; le guidon relevé la permet mais je sens bien que la position pourrait se révéler fatigante à long terme. La boîte DCT révèle tout son intérêt quand il faut rester vigilant sur les endroits où placer la roue avant. J’ai juste à m’occuper de bien me positionner et à doser la poignée de gaz. Très reposant.
Je suis très attentif aux réactions du train avant. Cela fait en effet plusieurs mois que je me pose des questions sur le type de moto que je souhaiterais acquérir bientôt. En effet, depuis 1 an et demi, j'ai retrouvé, après sept longues années d'abstinence "transalpiste", une 600 V-twin et son train avant à l'ancienne .... et j'ai réalisé à quel point j'étais en phase avec son comportement, sa manière de filtrer les chocs, aidée par la souplesse combinée de la grande roue à rayons, de la fourche à long débattement et des silent-blocs du guidon. Sur la NCX 750, même si la fourche a évolué dans le bon sens avec un amortissement efficace, je ressens parfois les réactions plus sèches du train avant. 50 mm de débattement en moins, une roue de 17 pouces de routière en sont la cause. Mon avis doit être nuancé vu mon lourd passé de possesseur de trail (plus de 500 000 kilomètres avec ce type de moto) . D'ailleurs, dans l'essai de Moto revue, le journaliste note au contraire " quelques effets de balancier sur les grosses phases de freinage à cause de ses débattements plus conséquents pour afficher son côté "trailisant". Comme quoi, tout est relatif et dépend de ses habitudes motardes.
Je fais une courte halte au col d’Aspin car le vent se lève et le pic du Midi est en train de disparaître sous une barrière nuageuse.
J’attaque la descente. Le revêtement est bon, la route déserte et je hausse naturellement la cadence. A plusieurs reprises, je constate que la boîte reste sur le 3ième rapport dans des virages serrés, et ne m’impose pas un rétrogradage en 2ième que je n'aurais pas souhaité. Je retrouve le plaisir que j’aurais eu si j’avais été en mode manuel en enchaînant ces virages en mode rapide-coulée et en ressortant dans la zone plutôt basse du compte-tours tout en appréciant le beau chant du pot d’échappement.
Je la trouve joueuse, cette moto et j’avoue m’interroger sur les observations que j’ai lues il y a deux jours dans Moto Revue. « C’est au moment de s’évader un peu en titillant l’accélérateur que l’on remarque que le moteur de cette X manque cruellement de fun. La boîte DCT, elle, n’arrange rien à cette fadeur ambiante. On a beau le titiller, le cravacher, le violenter, la réponse est toujours la même et elle est délivrée dans une sonorité encore plus feutrée que par le passé. Malgré les différents modes (D ou S1, S2, S3), rien ne change ou presque, les montées sont linéaires et sans saveur ». Au contraire, j'apprécie ce fonctionnement dans la zone de couple du moteur; avec une boîte si réactive, le bicylindre est constamment au bon régime et je sens qu'il est dans son élément .... et moi aussi. La puissance est délivrée de manière onctueuse et je ne me sens à aucun moment dépassé par les événements. Pourtant, je n'amuse pas le terrain dans cette descente, mais je ressens un fort sentiment de sécurité. Le châssis est vraiment équilibré.
J'adore cette faculté à tenir un rythme soutenu en toute sérénité. C’est l’occasion également d’apprécier le freinage qui répond bien. Je trouve que la réponse au levier est plus franche qu’avant, apportant un gain de confiance supplémentaire.
Ah, une petite route à droite, c’est pour moi. Tiens qu’est-ce qu’ils font là ces gendarmes ? Bon,on dirait qu' ils veulent que je m’arrête… En fait le contrôle va vite se transformer en discussion sur les mérites de la boîte DCT car j’ai comme interlocuteur un vieux motard qui, manifestement, a des à priori vis-à-vis de cette transmission. Je lui fais donc l’article en expliquant que, il y a dix minutes, j’ai pris un pied d’enfer avec cette « motomatique » dans la descente du col d’Aspin et lui suggère d’aller un jour, se faire sa propre opinion en allant chez le concessionnaire.
Après Bagnères, je file vers Tarbes par la vieille route, comme on dit dans le coin. La bulle rehaussée du modèle 2016 protège mieux qu’avant, mais c’est encore insuffisant pour moi et l'achat d'une bulle haute me parait indispensable.
Je roule à 125-130 km/h, et le compte-tours n'est pas encore à 4000 tours/minute. C'est très agréable de sentir un moteur qui ne force pas.
Tarbes approche et je n'ai toujours pas quitté le mode automatique S1. Un sacré progrès pour moi qui peut à lui seul justifier l'achat d'un modèle 2016 au lieu d'une occasion récente.
C'est déjà la fin des retrouvailles avec cette moto qui continue à me faire de l'effet, plus de quatre ans après le premier essai de la NCX 700. Je la trouve attachante, avec le sentiment très fort qu'elle doit s'apprécier encore plus au fil des kilomètres.
Le modèle 2016 s'est bien bonifié. Esthétiquement, je la trouve plus séduisante, la finition a fait un bon en avant, la peinture rouge est particulièrement réussie. La fourche a progressé et je trouve le bruit distillé par le pot d'échappement très sympathique. C'est quand même en premier lieu la boîte DCT nouvelle génération qui recueille tous mes suffrages: encore plus douce et réactive, on l'oublie totalement et ce mode S1 répond totalement à mes critiques antérieures, un mode D trop lymphatique et un mode S trop sportif. J'ai enfin trouvé cette phase intermédiaire tant espérée qui m'en a fait complètement oublier le mode manuel, ce qui est une sacrée performance!
Le plus gros défaut de cette NCX 750, c'est .... l'Africa Twin qui a croisé ma route, un certain 15 janvier et qui m'a ensorcelé, au point de me faire oublier son prix. Depuis, je ne cesse de penser à elle, tant elle est aboutie et parce qu'elle est dans la continuité totale de la Transalp, que je côtoie depuis l'année 1993, sans pour autant me lasser.
Mais, une Africa Twin DCT, c'est près de 6000 euros de plus qu'une NCX 750, ce qui n'est pas rien!
J'en suis au point d'envisager de patienter encore deux-trois années supplémentaires pour trouver alors une Africa Twin d'occasion.
Quant à ceux qui n'ont pas de problème existentiel motard comme moi(!), je leur conseille de faire l'essai de ce nouveau modèle. Il a atteint une belle maturité et mérite vraiment que l'on s'attarde dessus.