Sortie de mon premier roman : L’araignée et les volets de bois

Voyage dans le temps: le petit mono au Maroc - Nouveau départ

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Vendredi 5 heures. Je sors du sommeil, à l'écoute du silence environnant, interrompu par un discret et lointain appel à la prière. A 7 heures, je laisse Jean-Roland au pays des songes et sors ramener à la poussette ( dorénavant, je maîtrise parfaitement le sujet!), une à une, les motos stationnées un peu plus loin.

8 Heures. Jean-Roland est sous la douche. De mon petit balcon, je regarde la vie démarrer dans la rue piétonne. Une lancinante chanson s'échappe du café en face, des odeurs de nourriture en cuisson m'ouvrent l'appétit. Le temps est nuageux mais ce n'est pas grave, j'ai du soleil en moi. 

L'émotion est présente au moment de charger la moto. Notre voyage au Maroc va enfin pouvoir démarrer. Nous quittons cette belle ville arabo-andalouse. J'ai le cœur léger mais je suis aussi à l'écoute des moindres manifestations suspectes du moteur. Je note très vite une sorte d'imperfection, comme s'il y avait d'incessantes micro-coupures empêchant une alimentation correcte; ça manque de rondeur mais la moto roule malgré tout à un bon 80-90 km/h. Il y a beaucoup de lignes droites dans la première partie de l'étape et je retrouve mes réflexes d'antan pour doubler les camions: appréciation de la distance me séparant de la voiture arrivant en face, accélération jusqu'à arriver au cul du camion qui m'aspire, ayant bien calculé mon coup, passage de la voiture; je peux donc déboiter sans couper les gaz (surtout ne pas couper les gaz!), je me penche pour donner le moins de prise au vent et "j'avale" le camion. Méthode efficace mais qui occupe grandement l'esprit et permet de ne pas s'ennuyer.

Puis la route se fait sinueuse, plus agréable et commence à grimper. Je sens que le moteur est de moins en moins à son aise. J'apprends à compenser en maniant la poignée de gaz à bon escient. A priori, la carburation est loin d'être parfaite, c'est le moins qu'on puisse dire!

Nous arrivons à Azrou, à 1250 mètres d'altitude. La ville est bordée de forêts de cèdres et de chênes verts. Nous dénichons un charmant petit hôtel (Riad Azrou) où Fatima nous accueille à bras ouverts.

J'appelle Richard pour lui faire part de mes inquiétudes. Richard, c'est mon ami mais aussi mon mécano à distance, celui qui m'a souvent aidé et rassuré en cas de (rare) pépin mécanique loin de France. En 2005, c'était pour me conseiller alors que mes roulements de direction avaient un coup de fatigue en Syrie, à Alep. J'effectue un réglage approximatif du carbu en prévision de l'étape montagneuse de demain avec des cols à 2000 mètres d'altitude.

Avec Jean-Roland, nous élaborons un plan B qui nous rapprocherait de la cote atlantique au cas où le petit mono rendrait les armes demain. Décidément, ce voyage est rempli d'incertitudes. Mon compagnon de route m'avoue même qu'il ne s'attendait pas à voir une telle "épave" lorsqu'il a découvert mon petit mono le jour du départ! On a parfois besoin du regard des autres pour prendre conscience de la réalité des choses! Pour ma part, je décide de prendre les étapes au jour le jour. Ce vendredi marque les premiers tours de roues sur le sol marocain de ma Honda moteur en marche; 260 kilomètres parcourus, ça se fête. Ce soir, deux soupes suffiront à mon bonheur pour lutter contre le froid ambiant.