Sortie de mon premier roman : L’araignée et les volets de bois

Carnet de piste d'Alex - Lédenon 2 et 3 avril 2016

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Vendredi 1er avril 2016,12H30.

La moto m’attend sagement à la sortie du boulot. 500 kilomètres m’attendent. Demain, aura lieu la

première épreuve du Promosport de l’année 2016 sur le circuit de Lédenon.

 

Je suis impatient. Après la belle et régulière saison d’Alex récompensée par une troisième place

finale, je sais que, cette année, son but est de parvenir à décrocher le titre. C’est ce qu’il a annoncé

lors d’une sympathique soirée cet hiver. Mais des intentions à la réalisation il y a un pas à franchir car

je suppose qu’ils sont plusieurs à avoir les mêmes ambitions !

 

Exceptionnellement, cette année, la saison ne débute pas à Nogaro, ce qui me semble une bonne

chose, vu le temps régulièrement pluvieux sur le circuit de Gers en début de printemps. On peut

espérer un peu plus de soleil dans le département du Gard.

 

Bon, ça commence mal, la pluie s’invite et c’est même un déluge qui m’accueille aux alentours de

Montpellier. J’arrive bien trempé et frigorifié sur le circuit, les poignées chauffantes branchées sur la

Transalp. Pour un peu, je pourrais penser m’être trompé d’itinéraire et arriver à Croix en Ternois !

Je rejoins le box dans lequel trônent quatre motos, celle d’Alex bien sûr, mais aussi la KTM 390 de

Rémi, son petit frère qui va participer à cinq épreuves cette année. Et, enfin, il y a les deux Honda

CBF 500 des deux inséparables frères Vaucher qui font une saison complète en 2016. Leurs deux

motos ont revêtu une tenue plus présentable que l’année passée (en même temps, ce n’était pas

très difficile !) et je ne trouve plus trace de fil de fer ou de chaterton, preuve s’il en est qu’ils ont

décidé de faire les choses sérieusement cette année ! D’ailleurs, la caisse à outils bien rangée

témoigne de ce changement.

 

La moto d’Alex est encore plus belle que l’an dernier, avec une décoration superbe. Quant à la petite

KTM et son joli cadre treillis orange, elle est elle aussi très élégante.

 

 

Je rends visite à Thibaut Duchène dont j’avais suivi la belle saison l’an dernier, malgré des moyens

limités, avec à la clef une deuxième place finale. Cette année, il a intégré l’équipe Suzuki et j’ai le

sentiment qu’il s’y sent bien. Il m’indique qu’il aime particulièrement le train avant de la Suzuki, mais

aussi son moteur bien rempli à bas et moyen régimes, même s'il est moins puissant en haut que celui

de sa Kawasaki. « Il y a moyen de faire quelque chose avec » conclut-il.

 

Le soir, devant les assauts répétés de la pluie, le box est transformé en camping quatre étoiles, pour

cinq d’entre nous. Quoi de mieux que la bonne odeur des motos, du caoutchouc des pneus et des

divers produits pétroliers pour passer une nuit paisible et récupératrice….

 

 

Samedi,6 H30, je file à la douche. Le sol est sec mais il fait encore froid et le temps est incertain.

Je rencontre Pierre Sambardier qui se lance dans une saison complète en 600 après quelques courses

d’apprentissage de la catégorie l’an dernier. Il avait commencé à prendre la mesure de sa moto dans

les deux dernières épreuves et me parait plutôt optimiste.

 

 

9H20. Essais qualificatifs des 500. Benjamin et Baptiste s’élancent sur cette piste froide.

 

 

Résultat final, les 10 ième et 13ième temps. Ils sont déçus, espéraient mieux faire et savent qu’ils

seront contraints à faire un bon départ pour accrocher le bon wagon.

 

 

 

 

10H10. C’est au tour des 600.

 

Installé dans la ligne droite des stands, je regarde passer les motos dans le hurlement des moteurs.

J’avais oublié qu’une 600, même stock, ça va rudement vite. Alex me régale toujours avec son style

coulé, dénué de toute violence. Efficace en tout cas vu qu’il est classé 2ième après quelques minutes

d’essais. Il s’arrête un moment aux stands puis reprend la piste. Hélas, dans les tous derniers

instants, il est relégué à la 4ième position, loupant la première ligne de départ.

 

 

 

De retour dans les stands, je le questionne. « Je n’ai pas eu un tour clair dans la 2ième partie des

essais et je n’ai pas pu me lâcher. J’aurais pu rouler quarante tours à ce rythme ». Bref, je le trouve

plutôt serein, malgré son retard de plus d’une seconde sur le 1er, Guillaume Pot.

 

 

Les 1000 sont en piste. Comme toujours, je suis impressionné par la bestialité qui se dégage de ses

motos en action. Dans la ligne droite, les pilotes ne peuvent contenir des wheelings alors que les

moters hurlent en transperçant les tympans des panneauteurs qui les renseignent en bord de piste.

Thibaut est toujours aussi doux dans sa gestuelle et c’est très beau à voir. Il faut qu’il compose avec

une moto moins bardée d’électronique et de garde-fou mais cela ne se passe pas trop mal vu que,

après être resté longtemps en 7ième position, il décroche le 4ième temps en fin de séance à un peu

plus de deux dixièmes du détenteur de la pole.

 

 

 

 

 

 

Ce sont ensuite les petites 400 qui sont de la partie. Dans la difficile montée de la ligne droite, les

moteurs sont un peu à la peine, mais leur légèreté semble permettre bien des fantaisies en virage.

J’imagine l’émotion de Rémi pour ses tous premiers essais qualificatifs. Cinq ans après son frère,

c’est à lui de se jeter à l’eau et d’affronter les joies et parfois désillusions de la course. 21ième temps.

 

En début d’après-midi, ce sont les 500 qui ouvrent le bal. La pluie qui s’était installée cesse 20

minutes avant le début de la course. Aie ! Le choix des pneus risque de s’avérer difficile. Je suis dans

le virage du fer à cheval, d’où l’on peut suivre une bonne partie de la course.

 

J’imagine les deux frangins scrutant les nuages. Je les ai trouvés plus sages que l’an dernier, tout au

moins dans leurs paroles. Fini les comportements « généreux », surtout du côté de Benjamin, ce qui

pouvait donner une course splendide ici même l’an dernier avec une 4ième place en course, mais

aussi une pole position provisoire dans le premier tour des essais suivie immédiatement après d’une

chute au triple gauche et d’une nouvelle envolée dans ce virage lors de la deuxième course. C’est ce

que j’appellerai le style on-off !

 

Premier passage des motos. Je sens les pilotes sur la réserve. D’habitude, dans cette catégorie, c’est

l’attaque à outrance, les tentatives de dépassements parfois improbables. Sur cette piste séchante

avec les pneus pluie, il ne doit pas être évident de se lâcher. Les deux frangins n’ont pas réussi leur

départ et naviguent aux alentours de la 13ième place. Je crois même que Baptiste a abandonné car

sa moto, avec sa nouvelle décoration, passe totalement inaperçue dans le groupe ! Deux chutes

contraignent la direction de course à sortir le drapeau rouge.

 

Nouvelle procédure de départ profitable pour les deux frangins qui passent devant nous en 10 et

11ième position. Au tour suivant, alors que le crachin s’installe, ils sont 8 et 9ième derrière le 77

David El Bez. Cette deuxième manche va être très courte (5 tours) mais ils réussissent tous les deux à

faire l’intérieur au 77 qui élargit un peu trop à l’entrée du fer à cheval. Résultat : 7 et 8ième, mais

seulement 9 et 10ième au cumul des deux manches. Ils sont un peu déçus.

 

Les side-cars effectuent ensuite leur course et semblent achever de sécher la piste avec leurs

énormes pneus, mais, de ma position, je ne sais pas s’il reste des parties humides sur le circuit. Est-ce

qu’Alex va partir en pneus pluie ? Les nuages aux alentours peuvent annoncer une prochaine averse.

Que le choix doit être dur en pré-grille !

 

 

Les side-cars font leur tour d’honneur et un très léger crachin arrive....

 

 

1er tour. Romain Mansat, le numéro 10 passe en tête déjà détaché. Derrière, il y a Guillaume Pot,

l’auteur de la pole suivi par Alex qui a gagné une place.

 

2ième tour. Alex est passé devant Pot et se retrouve 2ième !

 

3ième tour. Pas de changement, mais le Guillaume Pot est dans son pot d’échappement. Je le vois

d’ailleurs, au loin, le dépasser dans la ligne droite.

 

4ième tour. Alex élargit dans la descente après le triple gauche. Que se passe-t-il ? Stupeur, il passe

devant nous en 5ième position, loin derrière Lucien Abellan et Thibaud Doutre. Plus de trace de

Guillaume Pot qui a dû chuter dans la descente.

 

5ième tour. Toujours 5ième.

 

6ième tour. Mansat a pris une sérieuse avance sur ses poursuivants Anthony Paul et Lucien Abellan.

Quant à Alex, il a entamé une remontée et pointe 4ième.

 

Au 7ième tour, je le situe à environ 2 secondes et demi du 3ième. Il va être dur de revenir sur lui.

 

8ième tour. Le speaker annonce le meilleur tour pour Alex !

 

9ième tour. Il est toujours 4ième mais l’écart s’est réduit. Allez, Alex !

 

10ième tour. L’avance de Mansat a fondu et Alex s’est nettement rapproché du groupe des trois

devant lui. Je commence à y croire tant il me semble « propre » et rapide.

 

11ième tour. Je le vois faire le freinage à Anthony Paul en bas de la descente après le triple gauche. Il

est 3ième !

 

Lucien Abellan passe en tête.

 

Au 12ième tour, il dépasse Mansat. 2ième position, je n’ose y croire !

 

13ième tour. Il passe en tête devant Lucien Abellan.

 

 

Mansat chute devant nous en perdant l’avant.

 

Abellan n’apparait plus dans le tour suivant (chute ?).

 

C’est fait, la première victoire en 600 est presque là, je reste tendu comme un arc dans les deux tours

suivants surtout que je ne vois pas le drapeau à damier annoncer la fin de course. Et, effectivement,

Alex passe devant nous en rythme de course et, juste après, les drapeaux rouges sont sortis. Le

préposé au drapeau à damier va devoir réviser son arithmétique !

 

Pas de tour d’honneur donc, mais une émotion énorme m’étreint. Victoire pour la première course

de la saison. Meilleur tour en course. On est loin de sa première course ici il y a deux ans où il m’avait

dit se sentir un peu perdu sur ce circuit atypique.

 

Retour rapide vers le podium pour assister, in extrémis, à la remise de coupe.

 

Alex résume sa course. Elle lui a rappelé sa première victoire en 500 à Carole où il avait remonté ses

adversaires sans avoir l’impression de forcer. Là, fut pareil. Après avoir évité Pot qui a chuté juste

devant lui et l'a retardé au 4ième tour, il a pu maintenir un rythme régulier et bien gérer les

dépassements des attardés (ils ne sont que 7 à terminer dans le même tour). Quant au choix des

pneus, il s’est décidé au dernier moment, en pré-grille, et a laissé tomber les pneus pluie. Ses

adversaires proches ont suivi. Par endroits, il fallait être vigilant avec une seule trajectoire possible.

 

Au final, il gagne avec près de 9 secondes d’avance sur le 2ième et 18 sur le 3ième. Une belle victoire.

 

Dans un des box voisins, je vois la Kawasaki de Pierre Sambardier bien défaite avec un réservoir

cabossé et des carénages détruits. Pierre a chuté dans le dernier tour en évitant un pilote tombé

devant lui. Grosse gamelle qui l’a bien secoué avec un pied et des doigts atteints.

 

 

 

Plus tard, c’est au tour des 1000 de rentrer en piste. Thibaut Duchène ne pourra malheureusement

pas se battre pour le podium. Il termine 5ième après s’être débarrassé de Marc Pasquinucci dans le

dernier tour. Thibaut me raconte sa course. Par crainte de l’arrivée de la pluie, les pneus ont été

légèrement surgonflés, ce qui fut une erreur. Ils ont d’ailleurs été anormalement usés. Il n’avait pas

pu faire d’essais sur sol sec ici car il était arrivé tard. En effet, il participait aux essais au Mans en vue

des prochaines 24 heures. En outre, il reconnait avoir eu un peu de mal à se mettre dans le rythme

au départ.

 

C’est la fin de la journée avec un ciel toujours menaçant et les 400 s’élancent. Après une première

année laborieuse avec très peu de concurrents, cette nouvelle catégorie a fait le plein cette année

avec 34 pilotes. Je pense qu’elle va remplacer à terme les 500 dont la longévité est assez

remarquable. C’est quand même en 1996 que les premières courses avec la CB 500 ont commencé ;

et cette moto est toujours présente en 2016. Belle longévité.

Rémi doit vivre intensément sa première course et j’imagine que, sous le casque, ça doit chauffer. Il

fait sa course dans les environs de la 20ième position et termine d’ailleurs 20ième. Pas de chute, un

pilotage propre, c’est un bon début. Bruno et Alex le conseillent pour la deuxième épreuve. Il faut

qu’il ose dépasser car il a été gêné par des pilotes moins rapides. Il faut que le métier rentre….

 

La soirée est joyeuse dans le box, malgré le climat incertain.

 

 

Dimanche, 8 heures. Nous sommes réveillés par les concurrents de la course d’endurance de 4

heures qui a lieu ce matin. Il tombe une fine pluie « crasseuse ». D’ailleurs, ma sacoche de réservoir a

des traces de sable mouillé. Et, sur la piste, on assiste à un festival de chutes sur une piste très

glissante.

 

Je fais un petit tour du paddock et rencontre Ludovic Rizza qui a abandonné les 500 pour les 600. Il a

terminé à une belle 9ième place. Je lui annonce qu’Alex avait eu le même résultat il y a deux ans,

pour sa première course en 600, dans des conditions climatiques similaires et lui souhaite de

connaitre la même progression.

 

Midi, la pluie se renforce, avec le vent qui se lève. Après le repas, un nouvel invité arrive, j’ai nommé

Monsieur Brouillard ! La visibilité devient nulle et Alex pense que les épreuves vont être annulées.

Effectivement, à 14 heures, la direction de course annonce la fin des épreuves.

 

Baptiste et Benjamin sont très déçus ; ils étaient motivés comme jamais pour tirer leur épingle du jeu

sur le mouillé. Ils ne sont pas Bretons pour rien !

 

Je quitte mes amis sous le déluge et retrouve un temps sec trente kilomètres plus loin…. A priori, la

pluie avait une nette préférence pour cette partie du département du Gard ce week-end !

 

Les 500 kilomètres sont parcourus sur sol sec, avec même le soleil qui m’accompagne un bout de

route ce qui me change un peu après ces deux jours très humides.

 

J’ai quand même droit à une belle averse sur le plateau de Ger entre Tarbes et Pau, comme

d’habitude devrais-je dire. Je me demande d’ailleurs si un descendant de chef indien ne s’est pas

installé dans le coin et s’il ne rend pas hommage à son ancêtre en invoquant régulièrement le dieu

de la pluie.

 

Ce fut un retour le cœur léger avec la victoire d’Alex dans la tête. La saison a bien commencé, pourvu

que ça dure !